Photographe ? Architecte ? Plasticien ? Peintre ? Voyageur ? Il est un peu tout cela à la fois, Georges Rousse. Mais c’est bien par la photographie qu’il a commencé son parcours artistique. Et son travail vise toujours à créer une image photographique mêlant intimement réalité d’un lieu abandonné, qui sert de toile de fond, et création éphémère. Sans Photoshop !
A ses débuts, dans les années 80, Georges Rousse prend en photo les architectures sous toutes leurs formes. Il aime à jouer avec la lumière et les cadrages. Il se reconnaît deux sources majeures d’inspiration : le Land Art d’une part et le « Carré Noir sur fond blanc » de Kasimir Malevitch d’autre part, inspirations qui le mènent à faire évoluer sa pratique. Alors il peint des personnages sur des murs dans des lieux à l’abandon avant de les photographier, pour les éditer en grand format. Aujourd’hui il crée des structures abstraites dans les lieux qu’il investit, et parfois même ajoute des éléments en volume qui participent à l’effet qu’il recherche.
Georges Rousse est un sculpteur de l’espace. Il utilise le mot anamorphose pour caractériser son travail. C’est un procédé de dessin qui déstructure les perspectives et déforme l’image suivant le point de vue de l’observateur. De nombreuses illusions d’optique emploient ce principe. Georges Rousse profite de l’anamorphose pour créer le doute et le questionnement chez celui qui regarde sa photo : qu’est-ce qui est réel ? qu’est-ce qui est faux ou ajouté ? comment s’articulent les différents plans ? L’artiste se plaît à brouiller les pistes ! Car à l’espace réel du lieu élu et à l’espace fictif créé par l’artiste vient s’ajouter un troisième espace : celui qui n’existe que le temps de la photographie, suivant son angle de vue et sa lumière, uniques.
Le photographe se promène de par le monde, quand il n’est pas appelé pour une commande précise. Il choisit des endroits désertés, souvent prêts pour la démolition, et qui l’inspirent. Il prépare alors son intervention en réalisant des croquis. Puis, une fois dans les lieux, il fait obstruer tous les passages de lumières pour projeter la forme plane qu’il veut créer, forme qui est alors tracée dans l’espace existant à l’aide de craies, de crayons. Alors vient le moment de peindre tous les éléments suivant le plan de l’artiste. Enfin c’est l’appareil photo qui prend la place du projecteur, avant que le lieu ne soit rendu à son destin.
Les préparatifs sont longs en regard de la prise de vue qui va clôturer le travail du photographe ! Et pourtant c’est pour cet instant singulier, intime et fort, où l’artiste entre en relation avec l’espace anamorphosé, que Georges Rousse s’applique tout au long du projet. Et l’œuvre de l’artiste est toujours étonnante !
Voici une vidéo qui présente superbement le travail de Georges Rousse et permet d’admirer tout à la fois les préparatifs du lieu choisi, la prise de vue et l’évolution de l’image avec l’angle de vue et la lumière. L’événement concernait le café Loin, à Matsushima au Japon, au printemps 2013.