Chef-fondateur d'un orchestre symphonique, directrice de l'école de musique et de danse de Stains (Seine-Saint-Denis), Zahia Ziouani, 29 ans, s'emploie depuis plusieurs années à faire découvrir la musique classique aux habitants de la banlieue, dont elle est issue.
"Les gens de banlieue n'aiment pas que le hip-hop, c'est la musique classique qui réunit le plus de monde, on le voit bien à Stains, où l'auditorium est plein à chaque représentation. Certaines familles ne sont pas habituées mais elles sont très curieuses et contentes de découvrir cette musique. C'est important de leur transmettre un patrimoine musical qui a traversé les siècles", a expliqué à l'AFP Zahia Ziouani, jeune femme brune toute en rondeur, au sourire communicatif.
Bien sûr, note-t-elle, "un accompagnement dans la démarche est nécessaire car les conditions matérielles ne sont pas toujours réunies pour qu'un enfant puisse jouer d'un instrument chez lui, par exemple: mais les parents s'investissent dans l'éducation de leurs enfants et on arrive à cette ouverture", souligne la jeune Zahia.
Se revendiquant comme une militante pour le 9-3, elle explique ainsi l'élan qui la porte: "J'ai envie de participer à toute cette sensibilisation envers la banlieue et depuis toujours je suis soucieuse de changer son image négative pour montrer aux habitants de ces quartiers qu'ils ne sont pas des victimes et qu'ils ne doivent pas vivre cette image comme une fatalité: ils ont un potentiel que j'ai envie de montrer".
Son école de musique et de danse, tout au long de l'année, brasse plus de 400 élèves de 40 nationalités différentes et issus de divers quartiers de Stains: "Nous arrivons ainsi à un développement de la culture qui est essentiel pour les habitants de ces quartiers", fait-elle valoir.
Etre une femme, jeune, d'origine algérienne et chef d'orchestre n'a pas toujours été simple pour Zahia. Elle a travaillé dur, combattu les préjugés sur la banlieue et s'est fait une place dans le milieu de la musique classique qui compte très peu de femmes chef d'orchestre. Après s'être donné elle-même les chances d'y arriver, elle souhaite aujourd'hui être reconnue pour ses valeurs artistiques et non pour ses origines.
Il y a dix ans, Zahia, guitariste et altiste de formation, a créé son propre orchestre symphonique, intitulé "Divertimento", où elle a réuni de jeunes talents et de jeunes professionnels de Paris et de Seine-Saint-Denis qui se produisent en France mais aussi à l'étranger. L'orchestre est actuellement en résidence à Stains.
La jeune femme a également dirigé l'orchestre symphonique du Caire et s'est vu attribuer pour l'année 2007 le titre de premier chef invité de l'orchestre national d'Algérie.
Michel Beaumale, maire PCF de Stains, "ne regrette pas de lui avoir donné sa chance" il y a quatre ans en la nommant directrice de l'école de musique et de danse où "les effectifs ont doublé depuis qu'elle est arrivée". "Elle apporte une grande ouverture musicale avec une qualité pédagogique, elle est talentueuse et nous avons énormément de chance qu'elle se soit engagée dans une petite ville comme la nôtre", ajoute-t-il.
Zahia Ziouani se dit, elle, "très attachée à ce département: j'y vis depuis mon enfance, je le connais bien, je m'y sens utile, la ville de Stains m'a séduite car elle est dynamique et même si j'y suis arrivée à une période difficile liée à la délinquance, il y avait plein d'espoir".