Nana nous vend sa boîte à déchiqueter les serviettes hygiéniques comme une révolution. "Fini le stress et les soucis" dixit la marque. Cette "jolie" boîte rose (parce qu'on est des filles) fonctionne avec une lame rotative et une batterie. Comment ça marche? C'est très simple, on appuie sur le bouton On, on déchiquette notre serviette comme un dossier classé confidentiel, et après une journée à se balader avec sa brique rose dans son sac, pleine de menus morceaux de serviettes ensanglantées, on rentre sagement chez soi jeter ses déchets, à l'abri des regards et de la conscience collective.
La jolie boîte à broyer les menstrues ne pèse que 978 grammes (sic!), a une autonomie de 12h en veille et 3h en fonctionnement, et peut se charger sur votre smartphone grâce à une connexion USB (c'est bien connu, les smartphones ont une durée de vie très élevée, donc aucun souci de les utiliser comme chargeur pour boîte à ragnagnas). Ça vend du rêve, non?
Ce qui me dérange dans cet objet, outre la stupidité du concept, c'est que encore une fois, nous, pauvres femmes, devons nous débrouiller avec nos règles sales et honteuses, alors que personne ne veut lever le petit doigt pour nous. Mettre une poubelle dans les toilettes publiques (et privées tant qu'on y est, non mais le nombre de personnes qui n'ont pas de poubelle dans leurs wc!), est-ce vraiment si coûteux et ennuyeux? Pourquoi imposer aux femmes de se balader avec une brique d'1kg dans son sac pour ne pas imposer sa condition de femelle au monde extérieur?
Dans notre société qui se veut pourtant moderne, les règles sont encore considérées comme sales, il faut s'en cacher, il ne faut pas en parler. En acceptant de s'abaisser à utiliser le Shredpad, on continue à véhiculer ces idées totalement fausses et à donner raison à ceux qui les considèrent comme acquises.
Les règles ne sont pas sales, les règles sont naturelles, les règles font partie de notre condition de femme, elles existent au même titre que nous, les femmes ne doivent pas avoir honte d'avoir un corps en état de marche, elles ne doivent donc pas non plus avoir honte de leurs règles, donc au lieu d'inventer une boîte à honte portable, et si on se battait pour que toutes les toilettes publiques soient pourvues de poubelles d'une part, et d'autre part pour que les communications qui se font autour des menstrues aillent dans un sens plus sain où on soulignerait le fait que les règles font partie de la vie et qu'il faut arrêter d'en avoir peur?